Un point sur les chiffres et les inégalités durant la carrière professionnelle en France
Durant leur scolarité, les filles ont de meilleurs résultats scolaires que les garçons. Mieux diplômées que les hommes (en 20191, selon l’INSEE, la proportion de bachelières était de 85% contre seulement 74.0% de bacheliers).
Le 4 novembre 2022 à 9h10, les femmes ont arrêté d’être payées, et ce, jusqu’à l’année suivante. Cette date symbolique est calculée en fonction des inégalités salariales entre hommes et femmes qui perdurent toujours comme le prouve le graphique ci-dessous.
Le taux d’activité des femmes progresse régulièrement depuis le milieu des années 1970, alors que celui des hommes est plutôt stable depuis le début des années 1990 : en 20192 parmi les 15-64 ans, 69 % des femmes et 76 % des hommes contribuent au marché du travail.
En effet, en 2019, le revenu salarial des femmes reste inférieur en moyenne de 22 % à celui des hommes (contre 28 % en 2000). Un peu moins d’un tiers de cet écart s’explique par des différences de durée de travail. À l’arrivée des enfants, pour concilier vie privée et vie professionnelle, les femmes sont toujours plus nombreuses que les hommes à interrompre leur activité ou à réduire leur temps de travail: en 2019, celles qui travaillent sont trois fois plus souvent à temps partiel que les hommes (contre cinq fois plus en 2008).
Les femmes correspondent seulement à 43 % des emplois de cadres et de professions intellectuelles supérieures en 2020 (chiffre qui a doublé depuis 1980). En effet, elles ont moins souvent accès aux postes les mieux payés et travaillent dans des entreprises et secteurs d’activité moins rémunérateurs (aides à domicile, soin, caissières, agent d’entretien…), ce qui participe aussi à cette différence de salaire3. Avec des carrières professionnelles plus courtes et moins bien rémunérées, les femmes partent à la retraite en moyenne un an plus tard que les hommes et leurs pensions sont inférieures.
Être une femme en 2023
En terme de violences sexuelles, 94 000 femmes (soit environ 300 par jour) âgées de 18 à 75 ans sont victimes de viols et/ou de tentatives de viol au cours d’une année (Source: Observatoire national des violences faites aux femmes). Cela paraît élémentaire de le rappeler, mais ces femmes sont nos mères, nos sœurs, nos amies, nos collègues…
Dans 91% des cas, ces agressions ont été perpétrées par une personne connue de la victime. Dans 47 % des cas, c’est le conjoint ou l’ex-conjoint qui est l’auteur des faits (situation qui a augmenté de 21% entre 2020 et 2021 selon le Haut Conseil à l’égalité (HCE)). Suite aux viols ou tentatives de viols qu’elles ont subis, seules 12 % des victimes ont porté plainte (qu’elles aient ensuite maintenu ou retiré cette plainte).
Au 31 décembre 2021, 4 700 infractions d’outrages sexistes avaient été enregistrées en France par les services de sécurité, pour seulement 2 175 plaintes déposées. 81 % des femmes en France ont déjà été victime de harcèlement sexuel4 dans les lieux publics (Source: ministère de l’intérieur).
En terme de sexisme et selon le rapport du Haut Conseil à l’égalité de 2022, malgré des avancées indéniables (Une femme nommée première ministre, une directrice générale pour le groupe Orange), la situation reste alarmante.
Le rapport dresse le constat d’une société française qui demeure très sexiste dans toutes ses sphères : les femmes restent inégalement traitées par rapport aux hommes, et elles restent victimes d’actes et propos sexistes dans des proportions importantes (80% d’entre elles ont eu l’impression d’être moins bien traitées en raison de leur sexe au travail comme dans la société).
Par ailleurs, parmi les hommes de moins de 35 ans, les clichés sexistes sont plus présents (23% des hommes de moins de 35 ans estiment qu’il faut parfois être violent pour se faire respecter contre 11 % des hommes en moyenne).
Comment changer les choses ?
Cette année, on espère que la Journée internationale des droits des femmes du 8 mars mobilisera encore plus de personnes que précédemment, afin que cette réalité soit entendue par la société et nos dirigeants. En effet trop d’inégalités, de violences, et de discriminations demeurent et restent bien tolérées.
Pour faire changer les mentalités, et prendre conscience de nos éventuels biais sur le sujet, voici une comparaison qui nous paraît frappante et qui peut faire ouvrir les yeux. Lorsque l’on regarde le nombre de féminicides en France, leur nombre est de 143 par an, soit un tous les deux jours et demi (Source Vie publique).
Imaginez qu’à la place de femmes tuées par des hommes, il s’agisse de patrons tués par leurs employés. Un patron tué tous les 2 jours et demi par un employé. La réaction de l’opinion publique serait différente. Imaginez : le patron avait déposé trois plaintes et obtenu un ordre d’éloignement, mais un de ses employés l’a attendu devant chez lui et l’a abattu à bout portant. Vous en seriez peut-être horrifié. Et pourtant lorsqu’il s’agit de féminicides qui paraissent dans les faits divers, peu d’entre nous réagissent et la législation ne change pas.
Des mesures doivent être prises pour changer les choses et mieux protéger les femmes. Le rapport du Haut-Conseil à l’égalité sur le sexisme propose 10 actions pour diminuer le sexisme dans nos sociétés, et Équinoxe les soutient.
Il faut :
- Augmenter les moyens financiers et humains de la justice pour former plus et en plus grand nombre les magistrats et magistrates au sein des juridictions chargées de traiter les violences intrafamiliales.
- Instaurer une obligation de résultats du primaire au secondaire, pour l’application de la loi sur l’éducation à la sexualité et à la vie affective 5 dans un délai de trois ans, et prévoir une sanction financière en cas de non-respect de cette obligation dans ce délai.
- Que l’ARCOM (Autorité publique française de régulation de la communication audiovisuelle et numérique) régule les contenus numériques pour lutter contre les stéréotypes, représentations dégradantes, et traitements inégaux ou violents des femmes, en particulier les contenus pornographiques en ligne.
- Rendre obligatoire les formations contre le sexisme par les employeurs.
- Généraliser l’éga-conditionnalité6 (qui conditionne l’argent public à une contrepartie en terme d’égalité) et la budgétisation sensible au genre7.
- Créer une Haute Autorité indépendante pour lutter contre les violences sexistes en politique.
- Conditionner les aides publiques à la presse écrite à des engagements en matière d’égalité.
- Rendre obligatoire un système d’évaluation et une publication annuelle sur la part de représentation des femmes dans les manuels scolaires, informant voire conditionnant leur mise sur le marché.
- Interdire la publicité pour les jouets genrés.
- Institutionnaliser la journée nationale de lutte contre le sexisme le 25 janvier (qui vient officiellement d’ être reconnue par le Président).
Au sein d’Équinoxe, nous avons conscience que ces questions et ces sujets sont difficiles. Pour autant, ce n’est pas un motif suffisant pour ne pas agir. Pour que les choses changent et que les violences ainsi que les inégalités cessent, il faut que la peur et la honte changent de camp.
Pour qu’un pays qui prône l’égalité sur les murs de ses écoles ait la prétention de se définir comme la « patrie des droits de l’Homme et du citoyen », encore faudrait-il qu’il transforme ses paroles en actions effectives.
Alors, quand est-ce qu’on s’y met vraiment ?
📌 Notes de bas de page :
- L’année 2019 est utilisée car avec le COVID, la plupart des études réalisées notamment au travail ou dans les espaces communs ont été annulées ou ne sont plus considérées comme représentatives avec les périodes de confinement/télétravail et les mesures de distances imposées
↩︎ - Ibid ↩︎
- https://www.insee.fr/fr/statistiques/6047789?sommaire=6047805 ↩︎
- Le harcèlement sexuel se caractérise par le fait d’imposer à une personne, de façon répétée, des propos ou comportements à connotation sexuelle ou sexiste, qui portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, ou créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante. (Source: Service public) ↩︎
- La loi sur l’éducation à la sexualité et à la vie affective impose aux écoles, collèges et lycées, une information et une éducation à la sexualité dispensé à raison d’au moins trois séances annuelles et par groupes d’âge homogène. Ces séances présentent une vision égalitaire des relations entre les femmes et les hommes. Elles contribuent à l’apprentissage du respect dû au corps humain. ↩︎
- Mécanisme de mise sous condition d’aides publiques à des engagements concrets en faveur des droits des femmes (parité, égalité, lutte contre les VSS…). ↩︎
- La budgétisation sensible au genre est une méthode de budgétisation analytique permettant d’étudier les conséquences directes et indirectes des dépenses et recettes publiques sur les situations respectives des femmes et des hommes. Dans ce cadre, les budgets des politiques publiques et leur répartition sont évalués pour déterminer s’ils sont facteurs d’accroissement ou de réduction des inégalités de genre. ↩︎