Source : Save 4 Planet
Entre le 7 et le 19 Décembre, après la COP27 sur le climat en Égypte, et en même temps que la Coupe du Monde de football, une autre COP, bien moins connue, a pris place à Montréal. Lors de cette COP dont le sujet est pourtant crucial, il était question de la biodiversité. L’effondrement de la biodiversité, l’une des plus graves et l’une des plus ignorées des crises, fait partie des 6 limites planétaires que nous avons franchies.
Une des limites planétaires dépassée : l’effondrement de la biodiversité
Le concept de limite planétaire est né en 2009 dans un article publié par des chercheurs suédois qui souhaitaient caractériser les différents épuisements du système Terre. Ces épuisements représentent différents phénomènes biophysiques dont le dépassement crée des dégâts environnementaux nuisant à la vie. Aujourd’hui, le plus médiatisé d’entre eux est sûrement le réchauffement climatique. Pour autant, d’autres limites planétaires ont été dépassées de manière plus inquiétante. C’est notamment le cas de l’effondrement de la biodiversité. La diversité des êtres vivants et des écosystèmes de la Terre est menacée à cause de la suractivité productive de l’espèce humaine.
Le but de ce cadre théorique est de répondre à la question : « jusqu’à quelles limites le système Terre pourra absorber les pressions anthropiques (influences de l’être humain sur le vivant) sans compromettre les conditions de vie de l’espèce humaine ? ». Cette question, ce sont les scientifiques du Stockholm Resilience Center qui la pose. La réponse tient dans la nécessité de rester dans l’espace des 9 frontières qui définissent le cadre de
« développement sûr et juste » pour l’humanité. D’où la notion de « limite planétaire ».
Que nous apprend la science à ce sujet ?
Comme pour les problématiques liées au réchauffement climatique, il existe un GIEC de la biodiversité qui porte le doux acronyme d’IPBES, qui correspond en français à Plateforme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques. C’est un programme de l’ONU qui dans la même logique de collaboration internationale, fournit des rapports faisant l’état des lieux de l’effondrement de la biodiversité dans le monde.
Le tableau est tout aussi réjouissant que pour le climat, avec par exemple :
- “Le taux mondial d’extinction d’espèces est déjà au moins plusieurs dizaines à centaines de fois supérieur au taux moyen des 10 derniers millions d’années, et le rythme s’accélère” ;
- “L’abondance moyenne des espèces autochtones dans la plupart des grands biomes terrestres a chuté d’au moins 20%” ;
- “À l’échelle mondiale, le taux net de pertes forestières a diminué de moitié depuis les années 1990, principalement en raison du net développement des forêts aux latitudes tempérées et supérieures ; pour autant, les forêts tropicales — celles là même qui abritant une grande biodiversité — continuent de décliner et la superficie forestière mondiale représente aujourd’hui environ 68% de son niveau préindustriel estimé” ;
- “Une proportion importante des espèces évaluées est menacée d’extinction (environ 1 million sur les 8 identifiées sur la terre et dans les mers) et les tendances générales s’aggravent” ;
La bonne nouvelle, c’est qu’en résolvant des problématiques liées au réchauffement climatique, on peut aussi aider à la lutte contre l’effondrement de la biodiversité. Néanmoins, il faut rester vigilant car l’inverse est aussi possible. Une mesure bonne pour le climat ne l’est pas forcément pour la biodiversité : édifier un barrage entraîne des problèmes de circulation des sédiments, nutriments et animaux en affectant en aval les écosystèmes qui dépendaient du flux naturel (ou en tout cas antérieur) de l’eau.
Il est donc important de caractériser les actions prioritaires à mettre en œuvre au regard des impacts négatifs et bénéfiques qu’elles pourraient engendrer vis-à-vis du respect des limites planétaires. L’équilibre de la vie sur Terre est dû à la diversité des êtres et écosystèmes qui la peuplent, et c’est pour cela que les nations du monde entier sont concernées par cette question.
C’est quoi une COP sur la biodiversité ?
A l’instar du réchauffement climatique, les scientifiques ont alerté sur l’urgence de la situation depuis plus de 40 ans. En 1992, lors du Sommet de Rio, la communauté internationale adoptait la Convention-cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques (CCNUCC, voir l’article sur l’histoire des COP) et la Convention sur la Diversité Biologique (CDB). Comme pour le climat, l’organe directeur de cette convention est la Conférence des Parties (COP en anglais) qui est composée des différentes parties ayant ratifié la CDB.
Les COP sur la biodiversité se réunissent tous les deux ans depuis 1992. Cette COP15 a dernièrement réuni 195 pays et l’Union Européenne. La CDB vise à conserver la biodiversité, à utiliser durablement les différents éléments qui la composent et à partager de manière juste et équitable les avantages découlant de l’exploitation des ressources génétiques.
La dernière avancée majeure obtenue lors des négociations définissait des objectifs chiffrés pour la décennie 2011-2020 (aussi connu sous le nom des accords d’Aichi) avec l’ambition d’atteindre la protection de 17% de la surface terrestre et 10% des océans. L’IPBES précédemment cité fut créé à cette occasion.
Les objectifs d’Aichi sont détaillés sur la figure ci-dessous :
Ce tableau extrait du rapport global de l’IPBES sur l’évaluation mondiale de la biodiversité et des services écosystémiques fait l’état de l’art de l’avancement sur chacun des objectifs d’Aichi. Force est de constater que les engagements n’ont pas été à la hauteur des objectifs du plan stratégique. Néanmoins, les différentes parties qui se sont réunies à Montréal lors de la COP15 sur la biodiversité étaient nombreuses à avoir des objectifs encore plus ambitieux que ce qui était initialement prévu pour la rencontre.